Edward Ball / It’s Kinda Lonely Where I Am An Anthology 1977-2010
[Cherry Red Records]

9 Note de l'auteur
9

Edward Ball - It's Kinda Lonely Where I Am An Anthology 1977-2010Où est passé le numéro 7 ? Cela fait une éternité qu’on n’a pas eu de nouvelles d’Edward Ball, dont la carrière discographique s’est arrêtée il y a maintenant plus de dix ans. On a essayé de le contacter sans succès pour notre travail sur les Television Personalities et on s’est demandé si la sortie de cette remarquable anthologie sur le label Cherry Red Records allait le faire sortir du bois… On a rien vu du tout : ni interview, ni quoi que ce soit, à part un petit texte en introduction du coffret qui lui est consacré et un passionnant commentaire porté sur chacun des 61 morceaux rassemblés sur ces 3 disques pleins jusqu’au trognon, qui feront partie des plus jolis cadeaux de Noël de cette année pour tous les amoureux de pop anglaise.

Cela faisait lontemps qu’on rêvait d’une telle collection et Cherry Red Records a exaucé le vœu de tous ceux qui avaient l’intuition que le monde devait enfin une vraie reconnaissance critique à l’un des plus solides et doués artisans pop de l’ère moderne. Derrière les débuts (et la fin) des Television Personalities, avec The Times, Teenage Filmstars, Love Corporation ou encore le « groupe » de ses débuts O’Level, puis en tant qu’artiste solo, Edward Ball a livré entre 1977 et 2010 une oeuvre aussi subtile et précieuse qu’elle était difficile à suivre, une œuvre répartie sur une quinzaine d’albums et signées sous une bonne demie-douzaine de structures, de groupes ou de noms différents.

Sans tubes véritables ni une immense exposition, l’homme aura laissé dans les mémoires des fans de pop quelques petits cailloux qui résonnent encore aujourd’hui comme des pépites telles que Manchester (The Times – disque 3), I Hate Ibiza (The Times – disque 2), I Helped Patrick McGoohan Escape (The Times – disque 2), Pseudo Punk (O’Level – 1997 – jumeau du Part Time Punks des TVPs), ou les grands titres solo que sont The Mill Hill Self Hate Club (disque 1) ou Love Is Blue (disque 2). On pourrait s’amuser à citer nos morceaux préférés (This Is London sur le disque 1, London Fields ou encore le soyeux Tears on A Rainy Sunday) mais il est probable que chacun pourra y trouver son compte.

Ce qui épate toujours avec Ed Ball et les trente années de carrière qui sont couvertes ici, c’est le mélange de constance et en même temps l’amplitude du champ pop qu’il embrasse. Entre les titres fringants et mod, à la Beatles ou à la Kinks, les épisodes de chanteurs déprimés morrisséens et les morceaux qui préfigurent, dépassent ou participent à ce qu’on appellera avant ou après la brit pop, on se demande souvent si c’est le même type qu’on entend. Sonnant tantôt comme les Television Personalities en moins punk, Oasis sans Liam Gallagher, Blur en plus cool, les Beatles, Martin Newell ou Paul Weller, Ed Ball signe parmi ces soixante morceaux des chansons épatantes dans des registres très différents et qui renvoient à des influences ou à des références vastes et diverses. Le groupe The Times est au final probablement l’étiquette la plus significative et la plus évidente dans tout ça, par son englishness et son élégance, sa profusion et sa beauté formelle, mais on ne peut pas s’empêcher de se souvenir qu’on avait dansé un peu au début des années 90 sur les productions house d’un Love Corporation qu’on avait pas réécouté depuis.

 Devenu l’un des éléments pivot du label Creation, Ed Ball a pu observer le cours de la pop anglaise comme nul autre et accompagner des groupes au succès invraisemblable. Il n’aura étrangement et dans son travail personnel pesé sur rien du tout, comme si ces morceaux étaient lancés les uns après les autres sans grand espoir de conquérir le public de masse. Estimé par les critiques, un peu écouté mais jamais vraiment célébré, cet homme discret a sans doute payé une voix trop neutre, un engagement timide et à reculons dans un marché qui valorisait les types hauts en couleurs, ainsi que sa capacité à faire ce qu’il voulait. Cette absence de plan de carrière se sera concrétisée en 2010 avec une disparition totale et radicale. On a annoncé qu’il faisait du court métrage mais personne n’a jamais vu un de ces films. Ce type est un mystère.

Pour les amateurs de curiosités, le disque 3 comprend outre les morceaux de Love Corporation dont on a parlé la reprise par The Times du Blue Monday de New Order, Lundi Bleu en… français. La francophilie du bonhomme est l’une de ses autres caractéristiques attachantes à l’image du chouette French Film Bleurred de 1989 qui préfigure à bien des égards le mode opératoire de Jarvis Cocker et ses Pulp.

Pour un prix modique, It’s Kinda Lonely Where I Am, est la meilleure occasion que vous aurez de vous approcher de l’épicentre de la pop anglaise cette année. Ed Ball est un rêve indé à lui tout seul : superbe et encore bien caché, un chanteur qui enchante et que vous aurez (presque) pour vous tout(e) seul(e).

Tracklist

Disque 1
01. The Times – Red with Purple Flashes (Single Version) (1981)
02. Edward Ball – the Mill Hill Self Hate Club (1996)
03. The Times – Big Painting (1983)
04. The Times – Tears on a Rainy Sunday (1985)
05. The Times – Crashed on You (1989)
06. Ed Ball – It’s Kinda Lonely Where I Am (Single Version) (199
07. The Times – Stranger Than Fiction (1983)
08. The Times – Heaven Sent Me an Angel (1988)
09. Edward Ball – Docklands Blues (1997)
10. The Times – Godevil (1988)
11. The Times – Life (1989)
12. ‘o’level – Pseudo Punk (1977)
13. Teenage Filmstars – Kiss Me (1992)
14. Teenage Filmstars – There’s a Cloud over Liverpool (1979)
15. Edward Ball – Trailblaze (1996)
16. The Times – This is London (1983)
17. The Times – 3 Pages in Record Collector (1999)
18. Teenage Filmstars – I Apologise (1980)
19. Ed Ball – if a Man Ever Loved a Woman (1995)
20. The Times – Sorry I’ve Written a Melody (1993)

Disque 2
01. The Times – I Helped Patrick Mcgoohan Escape (Single Version
02. Edward Ball – Love is Blue (1997)
03. The Times – Whatever Happened to Thamesbeat (1983)
04. Ed Ball – a Ton of Blues (1995)
05. Teenage Filmstars – Storybook Beginnings (1979, Released 199
06. The Times – Blue Fire (1984)
07. The Times – Just a Song (1987, Released 1997)
08. The Times – I Hate Ibiza (1999)
09. The Times – Boys Brigade (1984)
10. Edward Ball – Never Live to Love Again (1996)
11. ‘o’ Level – We Love Malcolm (1978)
12. Teenage Filmstars – Kaleidoscope (1992)
13. The Times – Picture Gallery (1982)
14. Ed Ball – She’s Just High Maintenance Baby (1995)
15. The Times – Opinionated Pop Svengali (1999)
16. The Times – Baisers Voles (1990)
17. The Times – Times TV (1986)
18. ‘o’level – Leave Me (1978)
19. The Times – Boys About Town (1986)
20. Edward Ball – Controversial Girlfriend (1997)
21. The Times – Love and Truth (1990)
22. The Times – Kill the Playlist (1999)
23. Edward Ball – Song to the Lighthouse (2010, Previously Unrel
24. Teenage Filmstars – Physical Graffiti (1997)

Disque 3
01. The Times – Manchester (Single Version) (1990)
02. The Times – from Chelsea Green to Brighton Beach (1991)
03. The Times – a Girl Called Mersey (1991)
04. The Times – Lundi Bleu (Radio Edit) (1992)
05. The Times – London Fields (1989, Released 2009)
06. Love Corporation – Palatial (Danny Rampling Remix) 7 Edit (1
07. Love Corporation – Fleshtones (1989)
08. Love Corporation – Give Me Some Love (Weatherall Remix) (199
09. The Times – Confiance (1990)
10. Love Corporation – Translucence (1994)
11. Love Corporation – Cathedrals of Glitter (Monkey Mafia Mix)
12. The Times – Aurore Boreale (1990)
13. The Times – Snow (1989)
14. The Times – French Film Bleurred (1989)
15. The Times – All I Want is You to Care (1993)
16. The Times – Da Da Won’t Buy Me a Bauhaus (1990)
17. The Times – Extase (1990)

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