Bobby Wratten a décidé de se faire rare. Non seulement il a depuis des années maintenant coupé les ponts avec la scène, assumant sans contrainte ce sentiment partagé par nombre d’artistes que tout se joue à l’écriture puis à l’enregistrement et non lors d’interminables tournées répétitives et laborieuses, mais il se fait aussi désirer lorsqu’il s’agit de donner suite à son précédent disque. L’homme au CV pop exemplaire, long comme le bras, voire les deux (The Field Mice 1988-1991, Northern Picture Library 1993-1994, Trembling Blue Star 1996-2011 sans oublier dans les années 2000 le side-project The Occasional Keeper avec Caesar et Carolyn Allen de The Wake) officie désormais sous le nom à rallonge de Lightning In A Twilight Hour. Après des débuts en fanfare marqués par un mini-album puis un premier album, quasi simultanés en 2015 suivis d’un EP en 2016 ainsi que d’un autre mini album édité uniquement en cassette vite épuisée et officiellement indisponible en digital et streaming, il a complément disparu des radars. Forcément, sans tourner…
Le voilà qui revient aujourd’hui avec un nouveau single annonciateur d’un second album à paraitre dans les prochaines semaines, toujours sur le label madrilène Eléfant records qui abrite sa musique depuis le premier album de Trembling Blue Stars. The Circling Of The Seasons et Neuchâtel, deux inédits qui ne figureront pas sur l’album s’inscrivent dans la ou plutôt les lignes directrices que Bobby Wratten s’est fixé depuis plusieurs années. D’un côté, il explore la face la plus pop de sa création à l’aide du fidèle parmi les fidèles, le producteur Ian Catt mais aussi de sa garde rapprochée de toujours composée d’Anne Mari Davies (présente depuis l’album For Keeps des Field Mice), Beth Arzy (The Luxembourg Signal, Jetstream Pony) et Michael Hiscock (le bassiste co-fondateur des Field Mice). The Circling Of The Seasons est un de ces classiques pop dont la signature ne laisse pas le moindre doute. On y retrouve l’ensemble des ingrédients qui font de Bobby Wratten l’un des compositeurs les plus influents de la scène pop indépendante : une mélodie parfaite, des harmonies vocales angéliques jouant sur différentes textures, des guitares acoustiques et des couches de claviers aériens. Il ne manque rien, ou presque, le morceau ne parvenant pas à se hisser totalement à la hauteur de précédentes créations récentes de Bobby Wratten comme le formidable The Death Of Silence sur le mini LP Slow Changes.
A l’inverse, Neuchâtel qui met en avant la face sombre et ambiant que Bobby Wratten explore depuis toujours ou presque (l’étonnant Bumblebee sur le mini LP des Field Mice, Skywritting en 1990 en avait désarçonné plus d’un), renvoie assez clairement au guitariste space rock Roy Montgomery auquel était dédié un des mouvements de son long morceau ambiant de face B sur le EP And All The Ships At Sea. Ici, une seule note distordue à l’infini sert de substrat à une litanie d’éléments qui s’entremêlent et se superposent pour créer un univers complexe et lugubre, mais de toute beauté ; un petit bijou de drone noisy. Deux faces d’un même single, deux atmosphères que l’on devrait retrouver dans le futur album du groupe sur lequel rien ne filtre pour le moment.