Malcolm Middleton en avait fait l’annonce il y a quelques jours sur les réseaux sociaux : il y allait avoir très vite du nouveau pour Arab Strap. Le compositeur en chef des Écossais n’a pas menti puisque c’est hier que le groupe reformé pour le très beau As Days Get Dark en 2021 déjà puis à plusieurs occasions sur scène où nous les avions croisés en 2022, a confirmé la sortie prochaine (ce sera le 10 mai sur le label Rock Action Records) de leur nouvel album, I’m totally fine with it don’t give a fuck anymore.
Un bonheur n’arrivant jamais seul et comme c’est désormais la tradition (marketing), Moffat et Middleton ont mis en ligne le premier extrait de ce nouveau disque, le single Bliss, et son clip avant-gardiste dansé, histoire de donner le ton, mis en scène par un artiste en vogue Ains. Surprise, les guitares sont réduites à un rôle discret (mais décisif) au fond à gauche tandis que le morceau déploie ses charmes autour de sonorités électroniques exclusives. Arab Strap semble renouer avec l’univers musical de Philophobia dont le groupe a eu l’occasion ces derniers mois de célébrer l’anniversaire. Ces concerts ont-ils donné envie à Middleton de ressortir ces instruments et boîtes à rythme vintage ? On en est pas loin de le penser. Il n’y a pas ici de tube définitif à la First Big Weekend, mais un titre assez sombre et hermétique qui évoque le harcèlement des femmes sur internet, les réseaux sociaux, etc.
Le texte est assez alambiqué et très soigné mais le sujet, bien que très actuel, autour des haters de l’ombre ne nous semble pas parmi les plus décisifs qu’ait eu à traiter Moffat. Le mouvement d’ensemble reste vénéneux et vertigineux, avec des décrochés électro… presque dansants qui forment un grand écart perturbant avec ce qu’évoque le chant. Bliss renvoie au bonheur solitaire éprouvé lorsqu’on se déconnecte, un bonheur un peu misérable et qui s’appuie désormais sur ce qu’on considérait jadis comme un truc sinistre : se balader seule dans un parc. Ça reste assez astucieux.
When you’ll be bare and unknown, on a walk in the park in the dark all alone;/ your keys in your bag, your earbuds full blast to drown out the birds; / disposition downcast – and you will call it bliss.
Cette thématique de la digitalisation (de la haine, de l’amour et du sexe) était déjà assez présente sur l’album précédent. Elle semble centrale ici. La feuille de presse annonce un album dans son époque, presque engagé et militant, mettant en garde contre les forces qui tendent à déréaliser pour le pire le monde réel. Prise de position assez paradoxale et amusante pour un groupe dont l’évocation du réel…. consistait souvent à tirer un coup rapide et à vomir dans un seau Winnie L’Ourson ! La vraie surprise des chefs est peut-être finalement l’engagement sonique du morceau et son côté « banger » appuyé et marqué. Moffat a souligné qu’après avoir joué un peu en sourdine avec la tournée Philophobia, Arab Strap allait de nouveau s’autoriser à faire du bruit, beaucoup de bruit, à danser et à s’abandonner… Bliss en est une première illustration et c’est une perspective qui ne déplaît à personne. Rendez-vous au printemps pour d’autres aventures en Misérabilie.
Lire aussi :
Arab Strap met en ligne les démos d’As Days Get Dark