Tube du Mois : Philip Goth de pire en mieux avec Ambient Birds

Philip Goth - Ambient BirdsOn ne sait pas dans quelles conditions vit actuellement Philip Goth. Notre coup de cœur de l’année 2021, avec son premier et remarquable album, auquel on avait accordé une longue interview dans la foulée, est de retour deux ans après avec un énigmatique EP 2 titres intitulé Ambient Birds.

L’iconographie interroge : un saint jardinier (?) massacré par des types qui ressemblent à des droogies sortis d’Orange Mécanique ou à une foule déchaînée à la Frankenstein. La peinture est saisissante, envoûtante, comme tirée d’un brouillon conceptuel et habité de Night Shyamalan. Et les chansons ne nous rassurent pas tout à fait sur l’état mental et de fortune du chanteur américain.

Ambient Birds et Wrestlemania sont aussi glaçantes que fascinantes. « These are the last of the last days, don’t worry.« , chante Goth sur la première, évoquant ouvertement une forme d’apocalypse à venir où l’on croise le son des derniers oiseaux, une planète quasi morte et d’anciens couples à la dérive. La télé est allumée sur un concert de tee-shirts mouillés dans un bar vide, vision fascinante d’un désarroi personnel, et très américain, étendu à la Terre entière.  En un peu plus de trois minutes, Philip Goth dresse un portrait horrifique d’un monde en totale déconfiture qu’il prolonge dans un Wrestlemania encore plus flippant et désespéré.

« I am gonna die alone, broken, unknown, singing to the brass stain on a ceiling of an empty room… i was a vessel of doom…. i hate myself i wanna die.« , déclame-t-il à l’entame de ce titre quasi parfait qui, sur un accompagnement ultra minimaliste, brosse le portrait d’un destin brisé sauvé, partiellement, par un amour lui-même en perdition. On pense à l’écoute de ce single aux portraits macabres d’un Hubert Selby Jr. Les images sont fortes, réalistes, crasseuses mais en même temps lumineuses et pleines d’énergie. La mort est évidemment au centre des inquiétudes du chanteur, omniprésente mais qui se défile. Les sursauts de vie procurés par la drogue ou l’amour (le sexe, l’attachement) rendent invincible une créature qui n’en a plus pour longtemps dans une société indifférente et qui s’écroule sur elle-même.

Ce n’est évidemment pas avec ce genre de morceaux que Philip Goth va se tailler une place dans les charts et les boîtes de nuit. Wrestlemania est un titre sans fond, dérythmé et presque triomphant sur son final. La puissance poétique et crépusculaire des deux titres nous renvoie pourtant aux grandes années d’un Bill Callahan au sein d’un Smog sombre et profond comme un trou noir. Philip Goth évolue à ce niveau insensé là, plus radical encore, plus sec et aride dans sa façon de composer.

On a le sentiment que lâcher quelques euros sur le Bandcamp du bonhomme ne serait pas inutile et permettrait de nourrir ce qui pourrait bien être l’œuvre la plus fragile et importante des temps actuels.

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