Kid Loco / The Rare Birds Remixes Part 1
[Wagram Music]

Lorsque l’un des remixeurs les plus habiles du monde (Kid Loco) s’attaque au meilleur album de l’an dernier qu’il a lui-même composé, cela donne rien moins qu’un appendice passionnant à ces Rare Birds qu’on a tant écoutés. Album 100% électronique et assemblé en studio, The Rare Birds se prêtait par nature à une relecture avec ses longs développements instrumentaux et ses boucles folles, ses décrochés jazz ou prog, et ses effets lounge pop.

Ce sont ces pistes et ces faux nez musicaux que Kid Loco remixeur choisit d’exploiter pour proposer cinq versions de quatre morceaux du disque. Le musicien étrangement n’opte pas vraiment pour des interprétations univoques qui auraient consisté à s’engouffrer dans un genre et à tirer le morceau dans un sens ou dans l’autre. Il reste sur la ligne de crète de l’indécision et du transgenre. Ainsi, il retravaille l’immense Claire avec beaucoup de délicatesse en creusant la voie de l’électro galopante, en resserrant les boucles et les rythmiques, en même temps qu’il en souligne la structure romantique et met en avant le piano. Ce « deux en 1 » permet de conserver toute la richesse du motif initial, sans lui enlever son charme et sa souplesse. The Boat Song est adouci et comme étiré par un Soul Sugar Dub qui fait durer le plaisir et renforce la sensation qu’on entreprend avec le Kid un long voyage à travers l’espace et le temps. L’exploration est étrange et presque empreinte de monotonie, comme si l’absence de rebondissement et de temps forts renforçait le dépaysement et la perte de repères. La version dub de No Tether qui suit gagne aussi en durée et en attention. La voix de Thomas Richet est étendue jusqu’à la plainte et prend le temps de formuler ses désirs et son manque de rêves brisés. Le beat est sourd et atténué, ce qui est à peu près tout le contraire de ce qui est entrepris ensuite sur Unfair Game.

On a déjà dit tout le bien qu’on pensait de ce morceau. Le travail de remix réalisé ici par Kid Loco nous permet d’en expliciter les ressorts. Un peu plus funk sur l’entame et la première mouture, le morceau  est fascinant de bout en bout avec ses accents disco et ses claviers pattes d’éléphants, le chant anglais à accent d’Olga Kouklaki et l’énergie dansante qui égale la sensualité 70s d’Isaac Hayes. Ce Patawawa mix est un bonheur qui met aussi en relief les choix de production réalisés par Kid Loco pour l’album. La version originale avait privilégié l’expression de la nostalgie et du regret, contrariant le rythme qui ne demandait qu’à s’emballer. C’était évidemment un choix judicieux dans le contexte de l’album qui laisse place ici à une version rutilante et sexy comme une boule à facettes.

La bonne nouvelle portée par ce disque de remixes est qu’il se dénomme « Part 1 ». Cela augure d’une suite qu’on attend avec impatience.