Semaine quelque peu éclectique et pourtant cousue de fils conducteurs avec deux survivants des années 1990 que l’on a tant aimées, deux duos au patronymes qu’il faut apprendre à dépasser pour savourer pleinement leurs propositions et une étonnante découverte passée par un télé-crochet de prime time de la première chaine de télévision française et ça, qui l’eut cru
Los Fanfarons – Ce Dragon-Là
On connait tous un restaurant « chinois » comme celui là, tenus par des asiatiques affables, fiers de leur décoration kitschissime patiemment assemblée au fil des années et des voyages au pays, mus par la sincère intention de vous faire passer un bon moment autour des saveurs succulentes que leur immigration parfois forcées a su rendre indispensable à nos palais curieux. C’est le genre d’endroit qu’ont choisi Cléa Vincent et Romain Sanderre, ces Fanfarons dont nous évoquions il y a peu le premier album, Ventilo, pour clipper ce qui est de loin le plus beau titre de l’album, Ce Dragon-Là. Réalisé par Roberto Cicogna que l’on retrouvait aussi au chant sur l’album, le clip nous ouvre les portes du Magical Dragon Kitchen, un restaurant unique où chaque plat devient une expérience sensorielle, étrange ou explosive. Le duo en profite pour annoncer une sortie physique de l’album uniquement disponible jusque là sur les plateformes de streaming mais qui prend dorénavant les traits d’une petite cassette audio.
Bibi Club – Amaro
Il est déjà l’heure du troisième album pour Bibi Club, autre duo dont nous suivons de près les productions depuis leurs débuts. Après la sortie de Le Soleil et La Mer en 2022 puis du quasi jumeau Feu de Garde l’an passé, les montréalais gardent le rythme et publieront le 27 février prochain Amaro, toujours sur le label Secret City Records. Le moins que l’on puisse dire, c’est que ce premier extrait éponyme nous plonge dans un univers qu’Adéle Trottier-Rivard et Nicolas Basque n’avaient jusqu’à présent que peu exploré, signifiant probablement un certain changement de direction artistique. Pourtant, on savait le duo mu par une certaine spiritualité et un humanisme qui transpirait de leur musique mais Amaro nous plonge cette fois dans des ambiances presque chamaniques. Beat dansant proche de l’EBM, guitares sales et inquiétantes, voix incantatoires : le morceau est un tourbillon à la fois oppressant et libérateur plutôt étonnant, réussi et qui a le mérite de vraiment aiguiser notre curiosité pour ce disque qu’il faudra attendre encore 4 mois.
Okali – Thylacine
On n’est pas toujours les premiers sur le coup. La preuve, on découvre aujourd’hui Okali, duo franco-camerounais mené par Gaëlle Minali Bella et Florent Sorin qui trace déjà sa route depuis un moment, comme en témoigne un CV XXL fait de différents festivals d’envergure (Fête de l’Huma, Cabaret Vert) et même, ah ça c’est sûr, on l’a loupé, d’un passage par The Voice l’an passé. Le duo déploie une musique sans frontière où se côtoient sonorités africaines, trip hop, rock et dub et où les vagues de guitare et les voix incarnées sont les battements d’une musique sensible et instinctive composée sans code afin de tracer sa propre route qu’un univers visuel très recherché vient personnalisé un peu plus. En témoigne cette vidéo tournée en plan séquence illustrant Thylacine, la figure du Tigre de Tasmanie qui avait aussi inspiré Les Marquises il y a quelques années. Le duo sortira son premier EP début 2026 et il n’est pas impossible que l’on se penche un peu plus sur cette jolie découverte.
An Ocean Of Embers – Heterochromy
Les plus anciens se souviendront peut-être d’un excellent groupe rennais, Les Autres, dont la carrière plutôt fulgurante contribua à tracer la route française de la noisy pop / shoegaze en seulement deux singles et un album entre 1992 et 1994. Chacun vaqua ensuite à ses occupations et le guitariste Jimmy Arfosea mène depuis quelques années sa barque sur les bords de Loire nantais avec le label Ovvk Recordings, véritable entreprise d’auto-archivage numérique mais aussi un nouveau Projet, An Ocean Of Embers, déjà responsable d’une bonne poignée de EP numériques depuis le début des années 2020. Pour la première fois, le nouvel enregistrement du groupe, Quartz EP, bénéficie via le label de Brighton Shore Dive Records d’une édition physique en vinyl et CD et pour l’occasion, An Ocean Of Embers illustre le premier titre du EP, Heterochromy, d’une très jolie vidéo qui ravira les nostalgiques des dimanches après-midi pluvieux à mater des documentaires naturalistes et animaliers. Les colibris qui y virevoltent élégamment semblent comme envoutés par le son des guitares et des ambiances musicales qui ne manqueront pas de rappeler le meilleur de My Bloody Valentine.
Perio – The Last Goodbye
Eric Deleporte fait incontestablement partie des personnalités incontournables du rock indépendant français depuis les premiers pas de son avatar Perio, alors duo franco-américain sur l’excellent label Lithium dans les années 1990. The Sharp Bones Of My Sleep est seulement son sixième album et il sort ce vendredi sur le tout aussi incontournable label parisien Objet Disque qui l’héberge depuis 2015. Alors que Graffiti Palace, le premier extrait nous entrainait il y a quelques semaines dans un univers franchement psyché et Beatlesque, The Last Goodbye est une de ces ballades arides et tendues dont Perio a le secret, magnifique de concision et d’ascétisme sans toutefois renier quelques arrangements parcimonieux (des très beaux cuivres notamment) et qui renvoie à un univers hispano-américain que l’on aime tant chez Calexico ou le Mustango de Jean-Louis Murat. Il va sans dire que l’on tâchera de vous parler de The Sharp Bones Of My Sleep d’ici quelques temps.
