Avoir sorti ses trois albums sur le désormais incontournable label de Chicago Trouble In Mind est déjà une belle chose quand on veut s’offrir une visibilité dépassant le cadre franco-français, certes sympathique mais un rien restrictif. Mais avoir les honneurs du single club de ce qui demeure sans doute à ce jour le plus grand et renommé label indépendant au monde, Sub Pop est, malgré la taille du disque (7 pouces, autrement dit un 45 tours) probablement la plus belle des choses qui pouvait arriver aux parisiens d’En Attendant Ana pour encore mieux se faire remarquer après un troisième album unanimement bien reçu. On le savait avec l’entreprise artisanale de Too Good To Be True l’an passé que le single club qui avait connu ses heures de gloire au siècle passé n’était pas mort mais reconnaissons que cette 8ème saison depuis 1990/91 du label de Seattle force l’admiration en termes de persévérance même si les tarifs (il vous en coutera dorénavant 200$ pour 12 singles) sont devenus franchement prohibitifs. Surtout, il suffit de nommer quelques successeurs pris au hasard des 7 saisons précédentes pour bien comprendre dans quelle lignée En Attendant Ana s’inscrit : Nirvana, Codeine, Jesus & Mary Chain, Kim Gordon & Jay Mascis ou encore Sunn O))) cette année sont les prestigieux parrains d’une collection synonyme de visibilité accrue.
Si on s’en voulait un peu d’avoir manqué l’an passé l’occasion de vous parler en long et en large de l’excellent Principia, ce single est l’occasion d’une petite session de rattrapage. Si on aurait adoré voir le pur hit Wonder troner en face A d’un single à l’ancienne, force est de constater que Magical Lies et Teeny Tiny Tyche font office d’excellente carte de visite pour les habitués de Sub Pop et tous les autres fans du groupe, déjà conquis ou en devenir. Composés en 2022 puis un peu laissés à l’abandon, ne trouvant probablement pas tout à fait leur place dans la très homogène colonie de Principia, ces deux titres ont été enregistrés en milieu d’année dernière et font aujourd’hui en quelque sorte figure de pont entre une étape pas encore achevée (le groupe poursuit son interminable tournée) et les envies d’un futur encore à construire.
Les deux morceaux portent une signature dorénavant bien identifiée avec sa basse énorme mise en avant, les cuivres lancinants de plus en plus présents de Camille Fréchou, des guitares sans fioriture mais d’une efficacité mélodique confondante et surtout la voix envoutante de Margaux Bouchaudon. Ils forment sur ce single un couple inséparable, uni et c’est encore plus vrai sur la version numérique, par un aussi joli que court interlude et explorent des thèmes que l’on devrait retrouver sur les prochains travaux du groupe. La petite surprise de la cheffe vient de quelques mots déclamés en français à la fin d’un Teeny Tiny Tyche un rien plus atypique et que l’on verrait bien devenir une future direction à suivre à la façon jadis d’une Laetitia Sadier avec Stereolab.
A noter qu’en parallèle à cette sortie, En Attendant Ana reçoit aussi les honneurs ce mois-ci de l’étonnant webzine américain Aquarium Drunkard et se font inviter à une de leurs Lagniappe Sessions. 3 titres, 3 reprises qui balisent comme à chaque fois qu’un groupe se plie à cet exercice un pan de leurs influences allant ici de McCarthy dont ils reprennent le standard Red Sleeping Beauty aux anglais de Dubstar que l’on avait presque oubliés en passant par l’inénarrable Sacha Distel avec un titre yé-yé peu connu, Ces Mots Stupides, lui-même adaptation du classique Something’s Stupid de Frank & Nancy Sinatra. 3 titres uniquement accessibles en ligne sur la page du webzine.
En Attendant Ana sera le 23 mars au Trabendo à Paris, le 17 avril à l’Iboat de Bordeaux, le 18 au Metronum à Toulouse et le 19 à la cité de la musique de Romans sur Isère avant de prendre la route de l’Allemagne, des Pays-Bas et de la Grande-Bretagne pour une quinzaine de dates très attendues.