[Playlist] – In The Trip #8

Playlist In The Trip #8Le radio-réveil se met en marche et la logorrhée commence. Ici des attentats odieux d’extrémistes, là des conjectures sur les tractations entre les deux despotes modernes qui imaginent se partager le monde comme on divise une cour de récréation. Par lâcheté pour ne pas sombrer dans la dépression, fermons les écoutilles en attendant la page sport. Ah zut, l’équipe de France se fait coiffer aux poteaux et le plus riches ont gagné en Champions League. La météo du jour ? Mouaip, va encore falloir s’équiper en équipement de plongée aquatique. Et il est salvateur de couper avant la séquence culturelle pour ne pas s‘abimer les oreilles avec des parisianismes. Dans la maison, ça s’agite, ça s’affaire avant de démarrer une nouvelle journée du quotidien. Les émotions sont refluées et on finira par être rincés dans cette grande lessiveuse avant la nuit tombée. Voilà pourquoi In The Trip existe, pour l’hygiène de l’esprit, et surtout du cœur.

01 – Social Order – Waiting

Inutile de prétendre autre chose : même si la saison 14 de The Voice bat son plein, après Miss You en fin d’année 2024, « l’autre face » du single digital de Social Order est la chanson qui me fait me retourner dès la 25éme seconde. Cela tourne même à l’obsession. En 18 mois, le trio de Las Vegas a diffusé huit chansons (uniquement via son compte Bandcamp) qui sont toutes imparables. La ligne de chant de ce Waiting est étourdissante et même s’il faut être friand des batteries tatapoum et des effets de production 80’s, c’est un tourbillon de romantisme qui renvoie directement à l’adolescence. Spéciale dédicace à tous les indécrottables nostalgiques. Surtout, que personne ne tente de nous en soigner.

02 – Fontaines D.C. Its Amazing To Be Young

Nos héros des temps modernes, Fontaines D.C., reviennent déjà avec un titre prophétique, empli d’ironie, pour un single qui présente seulement deux défauts. Le premier tient au format : quitte à faire un support physique, il aurait été judicieux de l’affubler d’un vrai visuel (d‘autant que le clip est chouette). Le second est dû à ces quelques secondes supplémentaires en fin de morceau dont on ne comprend pas l’intérêt (à moins que le titre ne se retrouve au tracklisting du prochain album annoncé sous peu – youpi !). Pour le reste, ce n’est que bavardage quant à la suprématie des Irlandais (qu’il n’est toutefois décemment pas civique d’admettre en cette période du Tournoi des 6 Nations).

03 – French Police – Baby

Si French Police nous avait habitué à matraquer ses chansons décharnées avec une boite à rythme strictement binaire et linéaire, on pouvait souligner qu’en 4 albums et une multitude de productions sur le net, le trio savait truffer ses compositions hispano-anglophones de piqués de guitares aussi efficaces qu’une escadrille de Mosquitos lancée en rase-motte. Avec Baby, extrait du EP digital, Espera, les Américains dévoilent leur art du changement de rythme qui fait perdre l’équilibre, fait vaciller comme suspendu par un doute, avant de s’y plonger corps et âme. Une petite surprise de forme qui rend jouissif ce contre-pied.

04 – Super Besse – Vospominaniya v Nochi

Puisque c’est devenu une tradition que de ne jamais dénigrer ce qui vient de l’Est (ce qui est prudent si Poutine ne s’arrête pas avant le Rhin), on a jeté notre dévolu sur Super Besse pour cette nouvelle sélection. Si l’appétence du groupe biélorusse pour le français intrigue (le nom du groupe est une station touristique du massif du Sancy, nombre de leurs productions porte un titre en français), musicalement, il n’y a guère de surprise. Depuis une petite décennie, le trio recycle les canons du post-punk, pour ce qui est de la raideur rythmique et les guitares répétitives, avec un indéniable talent et un brin d’exotisme grâce aux paroles incompréhensibles pour nous. En espérant que ce ne soit jamais la langue officielle au-delà la ligne Curzon (pour les passionnés de de géopolitique)

05 – The True Faith Can’t Be Sure

Ils ont beau avoir emprunté leur patronyme à une chanson de New Order, les Américains de The True Faith dévoilent ici une ressemblance frappante, non pas avec les Mancuniens, mais avec The Cure sur ce split single (partagé avec Demmers) alors que leurs précédentes productions lorgnaient vers le post-punk de Soft Kill. Que ce soit le chant « à la » Robert Smith comme pour la ligne de basse profonde, tous les ingrédients sont réunis sur ce Can’t Be Sure (le même titre qu’une des plus belles chansons de The Sundays, mais là, aucun rapport, ici, ça défouraille !) pour en faire un hymne à écouter très fort et pied au plancher.

06 – Topographies – Black Rain

Jouissant désormais d’un statut d’outsiders confirmés, topographies partagent l’affiche des pointures de la scène post-punk. Les Américains ne rechignent pas à la tâche, enchainant les tournées. Mais pour notre plus grande joie (morbide), le trio a quand même enregistré un nouvel EP 4 titres, Brutality of Fact, en attendant de donner une suite à leur 2éme album Interior Spring (Dark Entries – 2024). En moins de 3 minutes, ils étourdissent la mélodie en changeant plusieurs fois de directions et la laisse planter là sans crier gare. Si seulement, le sénile présidentialisé pouvait en faire autant…

07 – Anika Hearsay 

Les divas et autres prêtresses ne m’ont jamais fasciné – voire même leur posture de Pythie peut vite les transformer en épouvantail. C’est donc presque à mon cœur défendant, que je m’éprends d’Anika, qui au fil du temps (d’une carrière pourtant pas si longue) réussi à s’imposer par son talent, au-delà de son statut de journaliste politique engagée qui fricote avec l’intelligentsia (elle a commencé sa discographie chez >Beak, et a collaboré avec plein d’artistes comme SQÜRL ou Soley avant de fomenter le projet Exploded View avec des francs-tireurs mexicains). Ce single au rythme motorik implacable annonce un nouvel album sur Sacred Bones qui ne baisse jamais la garde et doit beaucoup, selon la Britannique, à l’influence de Hole. Messieurs, nous voilà mis en garde.

08 – Wings Of Desire – A Few More Years

L’excitation passée de découvrir une nouvelle composition du groupe Anglais le plus affriolant du moment, il y a une pointe de déception à l’écoute de ce single de Wings Of Desire. Quoi, le duo ne livre pas ici un hymne taillé pour les stades du calibre de New Order ou des Doves ni un brûlot harangueur pour enflammer un pub bondé de fans de Madchester ? Non, cette fois-ci, il s’agit d’une chanson mid-tempo, qui s’étire au fil d’une boucle répétitive. Et quand on s’en aperçoit, c’est trop tard : la mélancolie nous a envahi et on se prend à se retourner sur « ces quelques années en plus ». La classe.

09 – Mild OrangeWelcome Back (to the Glow)

Probablement que c’est parce qu’ils ont la tête à l’envers aux Antipodes, qu’au palmarès de la coolitude les Néo-Zélandais sont imbattables. Aussi Mild Orange partage le titre honorifique de « groupe le plus cool du moment » avec leurs compatriotes insulaires de Marlin’s Dreaming. Mais si ces derniers privilégient l’éducation romantique et la ligne claire, ceux-là préfèrent l’évidence de références « middle of the road » et la puissance de la fée électricité. En attendant un quatrième album qu’on espère aussi réussi que Looking for Space (2022), le quatuor divulgue un single dont le seul défaut est d’être trop court alors qu’on est en rythme de croisière sur l’autoroute.

10 – Beach Vacation – Slowly

Voix éthérée, guitares cotonneuses et mélancolie adolescente : la formule a fait ses preuves, mais bon sang ne saurait mentir. Les jeunes gens de Beach Vacation ont pu jouir d’une bonne éducation musicale à Seattle, un des bastions de l’indie-rock… mais ils ont manifestement suivi leur scolarité dans un lycée littéraire et ont bénéficié d’un programme Erasmus dans l’Ancien Monde. Il en résulte une appropriation personnelle de la pop-anorak britannique érigeant la douce mélancolie en étendard. Pas sûr que les protégés de Too Good To Be True trouvent grâce aux oreilles des college-radios, mais cet EP en cd 3’’, format aussi désuet qu’attachant, enchantera les vieux collectionneurs.

11 – Dumb ThingsWindows & Doors

Dans le genre pourvoyeurs de mièvrerie, ceux-là ne sont pas mal non plus. Après écoute de cette jangle-pop avec son refrain en « papapa », on replacera dans la généalogie de Dumb Things leurs compatriotes de The Go-Betweens, mais aussi The Chills, The Bats et quelques groupes anglais développés par Creation Records. Le quintet australien trousse sur cet extrait de leur troisième album à paraitre en avril une chanson aux harmonies bien mignonnes grâce à une instrumentation électro-acoustique et des arrangements malicieux.

12 – Object ImageI Am This Tune

Les Antipodes font toujours rêver, mais s’il faut se rendre comptable de notre bilan carbone, rentrons derechef dans l’Hexagone où l’on pourra se réjouir de l’écoute d’un nouvel EP artisanal, encore produit pour le compte de Too Good To Be True, qui promeut Object Image, projet de Franck Ruzé, sous un nouvel alias après plusieurs projets confidentiels. Comme l’anonymat reste une valeur précieuse et le culte de la personnalité est ici réfuté, on n’en sait guère plus, si ce n’est que le EP Every Time That You Were Shy regroupe 5 chansons qui balaient large le spectre de la (bedroom) pop, entre bricolage bucolique et référence à la synth-pop de Pet Shop Boys et aspirations baggy sound.

13 – Twin Shadow – Good Times

Après des débuts aux confins de l’électro-pop en mode domestique, une bifurcation new-wave, jusqu’à des tubes synth-pop imparables (difficile de poursuivre une carrière après Saturdays), on croyait Twin Shadow perdu pour la cause après un cinquième album marqué par une volonté de revenir à des sonorités plus caribéennes… et qui s’apparentait à un hommage à Wham! Franchement quand George Lewis Jr. verse dans le soul-funk, on ne le suivait plus vraiment. Et puis, là, que va-t-il se passer sur Georgie ? Difficile de le prédire eu égard à l’écart qui sépare les 2 premiers singles. Si l’un tâtonne en terrain synthétique, l’autre est ouvertement acoustique. Dans les deux cas, le Dominicain abandonne les fanfreluches pour se mettre à nu.

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