Autant les argentins nous ont bien filé le seum il y a quelques semaines avec leur fair-play aléatoire, leur sens de la provoc’ et du geste sale, autant les argentines, instruments de musique entre les mains n’en finissent plus de nous enchanter. On ne remerciera jamais assez, encore une fois, la radio de Seattle KEXP d’avoir mis sur notre route via une suggestion YouTube la vidéo de la session de Fin Del Mundo enregistrée en septembre dernier dans le cadre de la série « KEXP From Argentina » en collaboration avec le centre culturel Kirchner de Buenos Aires. Si Lucía, Yanina et les deux Julieta ont des origines vues d’ici très exotiques, ancrées dans le sud de la Patagonie, c’est bien à la capitale qu’elles ont formé un groupe qui, loin d’évoquer une quelconque apocalypse, aurait plutôt tendance à convoquer les jours meilleurs avec sa musique puissamment évocatrice et émotionnelle, à la croisée d’une dream pop un peu noisy et d’un post-rock qui aurait choisi la voix de la concision.
Formé en 2019, le groupe sort un premier EP sobrement intitulé Fin Del Mundo en 2020 sur lequel plane l’ombre d’Explosion In The Sky mais qui commence déjà à faire émerger une identité de groupe et un savoir faire musical bien trempé à base de textures à vous ficher le frisson et d’un sens mélodique affirmé. La suite, datée de septembre dernier, reprend la même forme d’un EP 4 titres, essentiellement digital. La Ciudad Que Dejamos prend un fort accent mélancolique et renvoie, comme beaucoup de disques sortis dernièrement, aux périodes troubles de ces dernières années, expériences dont on se serait bien passé mais qui ont contribué à renforcer la conviction que la liberté, passé le temps de la responsabilité civile de chacun, était un bien cher à cultiver précieusement.
On peut toujours regretter le poids des influences mais on peut aussi plus simplement s’émerveiller de ce qu’elles en font. Enregistrés en deux temps, deux morceaux à la fois, ce second EP montre une évolution sensible du son de Fin Del Mundo. Après un Hacia Los Bosques accrocheur et presque mutique, El Próximo Verano prend petit à petit des airs de tube dont il n’a pas forcément l’apparence au premier abord, grâce notamment à la voix extrêmement agréable de Lucía Masnatta et son accent argentin si caractéristique et doux. Plus calme, Desvelo renvoie encore et toujours aux conséquences intimes d’une période compliquée, les 8 mois du « confinement sans fin » qu’a connu de mars à novembre 2020 la région de Buenos Aires tandis qu’El Incendio, s’avère être un petit morceau de bravoure qui vous emporte dans son tourbillon épique et électrique.
En 2021, Las Ligas Minores avaient mis l’Argentine sur la carte sur rock mondialisé. Début 2023, leurs cadettes (de pas beaucoup) Fin Del Mundo confirment qu’il se passe à 11000 km de chez nous des choses vraiment excitantes qui nous rapprochent et qu’on est bien décidé à suivre de près. Merci KEXP !
La session KEXP enregistrée au Centro Cultural Kirchner de Buenos Aires le 22 septembre 2022…
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