LAAKE / O
[Mercury]

8 Note de l'auteur
8

Laake - OrchestraaA la croisée des chemins œuvre LAAKE. Autant dire donc que le projet de Raphaël Beau tombera à côté des cases. Trop d’infrabasses (et ça tape fort parfois) pour se présenter comme le cousin français de Nils Frahm même s’il partage avec le célèbre Allemand un rapport étroit, pour ne pas dire exclusif et fusionnel, avec le piano. Trop d’orchestrations symphoniques pour être assimilé complétement au réseau techno (encore que Vitalic et Laurent Garnier l’aient emmené en tournée). Trop intense pour que la plupart de ses compositions puissent servir de musique de film (ou alors, pour le final ultime d’un poignant James Bond à bout de course dans une explosion définitive – ce qui reste donc improbable puisque les héros ne meurent jamais). Pour autant, la major Mercury Records l’a signé après seulement deux formats courts auto-produits (69 puis PIAANO). Il faut toutefois préciser que le trentenaire s’était déjà fait une place en profitant pleinement de la visibilité que lui a offert le Piano Day et grâce au morceau Introspective portée par une vidéo remarquée (et à juste titre remarquable). Il a aussi réussi à boucler ses fins de mois grâce à l’utilisation de sa musique en publicité. Bref, on ne s’étonne plus de rien dans le petit monde de (feu) l’industrie du disque.

Et c’est tant mieux d’ailleurs, car LAAKE a eu des moyens d’enregistrer pour son premier album. Et cela s’entend (une écoute en MP3 ou pire encore en streaming relève de l’hérésie). Entouré de 8 musiciens, issus du milieu de la musique classique, le compositeur a pu donner une dimension à ses pièces qu’un logiciel aussi puissant soit-il et une excellente console d’enregistrement bien utilisée ne pourraient pas lui offrir.

Sur O, pour « Orchestraa » comme il le précise lui-même, cordes et cuivres sont à la lutte avec une architecture drastique synthétique. Le combat est homérique et les 11 parties sont autant d’escarmouches éclairs, de guets-apens vicieux, de pilonnage en règle, de sorties pleines de panache, de résistance suicidaire et de bataille rangée. Cela ressemble souvent à une guerre. Ou bien à l’histoire d’un couple passant par tous les états, du coup de foudre à la rupture qui déchire et la réconciliation à bout de force. Nous mêmes sommes exsangues, au bord de la rupture après l’écoute de ce long album intransigeant quasiment exclusivement instrumental à de rares exceptions – et ce ne sont pas les meilleurs passages à part lorsque Tallisker incarne le magnifique Mind. Dans cette instrumentation foisonnante et contre-nature, chacun projettera ce qu’il veut. Et ce n’est pas la moindre qualité que ce disque : ce n’est pas ce qu’il raconte ni même la forme du propos qui importe, mais bien ce qu’il permet d’imaginer.

Tracklist
01. Run
02. Panic
03. November
04. Broken
05. 1989
06. Fugue
07. Castaway
08. Mind Ft. Tallisker
09. Faather
10. Diffraction
11. Lights
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