Posséder les disques de Mendelson est un signe de reconnaissance, le gage d’appartenir au clan. Le clan de ceux qui apprécient le mot autant que la note, qui attachent autant d’importance à la forme qu’au fond.
Aligner les cinq albums parus entre 1997 (L’Avenir Est Devant) et 2013 (le triple volume Mendelson), en y adjoignant I/III de Bruit Noir (Ici D’Ailleurs – 2015), est un acte de soutien, un manifeste.
Toutefois, soyons honnêtes : on a beau défendre Pascal Bouaziz bec et ongle, clamer haut et fort le talent, voire le génie de ce type, ce ne sont pas des disques qu’on place tous les jours sur la platine. Passer l’un des disques de Mendelson en fin de soirée lorsque les invités tardent à décoller du canapé s’avère généralement très efficace. Et si, votre conjoint(e) choisit d’écouter Personne Ne Le Fera Pour Nous le dimanche matin au petit-déjeuner, vous savez déjà que la journée va être (très) maussade.
Mais, pour la première fois, Pascal Bouaziz s’avance sans détour, avec spontanéité. Simplicité, presque, serait-on tenter de dire. Ce n’est probablement pas pour rien qu’il réalise après pas loin de vingt ans de « carrière » un album sous son propre nom.
Quant au titre, il annonce clairement le contenu. Bouaziz délaisse les textes-fleuves dont on a pu se repaître sur le pantagruélique dernier album de Mendelson et les expérimentations sonores, les dissonances et la liberté du disque exutoire de Bruit Noir. Haïkus est le recueil de treize chansons courtes, limpides et acoustiques. Le ton est toujours cinglant, la tournure de phrase concise et implacable, la formule définitive. C’est la marque de Pascal Bouaziz. Mais tout en inscrivant cet album dans la continuité de son œuvre, il ouvre une autre porte.
Entouré de quelques musiciens complices (ses partenaires de Mendelson en premier lieu), le banlieusard traverse les grands espaces asséchés par le vent glacial de l’hiver et les cyclones d’un été asphyxiant. Les mêmes contrées que celles parcourues par Neil Young et Leonard Cohen, Bill Callahan et Sparklehorse. Autant dire que ça joue bien et juste. Toujours en retenue, toujours à bon escient. Et puis, il faut souligner l’apport de la chanteuse Lou, qui avec une incroyable discrétion, double presque à chaque fois le chant. Car, oui, Bouaziz chante sur ce disque. Au faîte de ce disque d’une grande richesse, Ta Main appartient à cette caste de chansons bouleversantes à la première écoute comme à la énième.
Si le temps ne retiendra peut-être pas Haïkus comme le chef-d’œuvre de Pascal Bouaziz au crépuscule (qu’on espère très très très lointain) de sa vie discographique, en revanche, il est fort probable que c’est celui que nous écouterons très régulièrement et auprès duquel on reviendra avec délectation.
02- La Trace
03- Cessez D’écrire
04- L’être Humain
05- Ta Main
06- Miracle
07- L’Ombre
08- Encore Envie
09- Avec La Peur
10- Toutes Ces Guerres
11- Loin
12- S’il Ne Fallait Que Ça
13- Les Choses