Singles de l’été (4) : Tensnake se défeuille en secret

Tensnake - Keep It SecretMarre du rock déprimant. Marre de la pop qui nous prend le chou. Marre tout simplement des mots, de lire, d’écouter. Nous, on veut glisser sur la vie comme un toboggan, les bras levés et les fossettes apparentes. Bonne nouvelle : l’hambourgeois Tensnake vient de sortir un nouveau single, Keep It Secret. Belle nouvelle : il amplifie l’attente autour de son nouvel album, Stimulate, sorti le 23 juin 2023. On attache la ceinture, débranche le cerveau : c’est parti.

Cela fait plus d’une quinzaine d’années qu’on suit pieusement l’itinéraire musical de Tensnake, Marco Niemerski à la ville. Ayant commencé avec une sorte d’electro-clash relativement sobre et élégant tout en fréquentant les grands labels house (Defected, Toolroom), l’artiste a astucieusement rendu plus généraliste sa musique sans jamais perdre sa sensibilité de cette crainte nostalgique, la crainte de la fin, une inquiétude toute 80’s dans l’âme. Le DJ ne se dénature pas, fidèle à lui-même. Keep It Secret est le dernier d’une longue traînée de morceaux sortis depuis le sympathique L.A., second album de 2020. Il clôt la trilogie de singles (avec Rooftop et  Sunshine) du prochain, petit nouveau se faisant attendre. De ces morceaux, Keep It Secret se distingue particulièrement bien.

Le morceau est irrésistible. La faute à la voix capturée et bouclée d’une certaine Jessy Lanza, mais que Tensnake laisse en liberté le temps d’un pont qui rappellera le brûlant Same Man de Till West et DJ Delicious. Les pistes n’ont pas grand chose à voir (Keep It Secret est plus candide) … et pourtant, elles ont tout à voir, groovy du tonnerre. Une certaine liberté, et une époque, celle du milieu des années 2000, en commun. Celle où la house investissait de nouveaux genres de musique à partir d’autres venant d’époques vénérées qu’on connaît bien (la pop 80’s, la disco 70’s). Et cela – et on insiste dessus – pour faire quelque chose de nouveau.

On ne sait plus si on est en 2023, en 2004 ou plus loin encore. L’imparabilité du morceau réside dans ce tapotement, ses notes gazeuses et pailletées, et sa phrase scandée émergeant de la fumée triturant l’auditeur. Ça ne tient pas à grand chose, un bon titre. On pense avec émotion à notre disc-jokey de cœur, Tonka, qu’on sait admiré par Tensnake, mais aussi à Junior Jack, Armand Van Helden et toute l’artillerie. L’Allemagne compte encore les producteurs électroniques mi-généralistes mi-underground les plus classes du monde, quand on pense qu’y résident les vétérans Digitalism et Boys Noize, dont les albums furent probablement ce qui se faisait de mieux dans le genre en 2021. Plus discret mais tout aussi humble, Tensnake peut prétendre à son rond de serviette.

Stimulate de Tensnake

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