On s’est longtemps demandé ça pour New Order et aussi pour les Pet Shop Boys. Est-ce de bon goût ou juste à côté ? Est-ce bien ou un peu nul sur les bords ? Comme les deux groupes précités, le duo Scratch Massive évolue souvent à la limite de notre notion du bien et du (mal), mais toujours du bon côté, comme si cheminer sur la crête menaçait parfois Maud Geffray et Sébastien Chenut de basculer dans le vide sidéral du bof, du mainstream ou du médiocre.
En invitant Yelle / Julie Budet pour ce nouvel extrait de leur nouvel album à venir (ce sera en février 2025), Nox Anima, le duo prenait le risque supplémentaire de placer cette chanteuse française douée mais parfois jugée « agaçante » par certains au premier plan. Des Choses navigue ainsi sur le fil entre esthétisme surjoué et épure convaincante. Le clip encapuchonné de noir façon cérémonie occulte ajoute à la solennité mystérieuse du propos. Est-ce qu’ils n’en font pas un peu trop ? On croise le fantôme d’Enigma ou d’Enya, cette ombre fugace et électro-pop, qui ne réussit toutefois pas à avaler le morceau et nous laisse assez vite tranquille. Des Choses s’appuie sur le savoir-faire atmosphérique prodigieux du duo pour donner à cette « petite chanson intimiste » une amplitude étonnante et complètement disproportionnée, renvoyant directement à cette capacité de Scratch Massive à faire sonner l’émotion pure et simple du cœur, de l’amour, du doute comme s’il s’agissait d’une messe ou d’une liturgie monumentale.
Le texte de Yelle est d’une simplicité quasi adolescente, qu’on pourra qualifier de « faiblarde » même si l’on cherchait à mal, mais vient converger avec la production ligne claire pour toucher juste et émouvoir. On finit par croire à la force de cette interrogation et surtout à s’attacher au delà de ce qui est convenu à son importance, comme si, par delà le cérémonial, l’alliance de Yelle et de Scratch Massive avait su, par magie, faire naître des enjeux qui n’existaient pas pour nous jusqu’ici. L’ensemble est altier et magnifique, curieux et sacré comme seules savent l’être les choses banales.
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