Chroniques accélérées : Julia Jacklin, Bill Pritchard, Normcore, Accident, The Brian Jonestown Massacre

Julia Jacklin - CrushingLes retards s’accumulent. Parfois même « les retards en retard ». Bon signe : la musique, malgré la baisse des chiffres de vente, conserve un niveau de production assez olympique. Voire pharaonique : combien de disques aimés, longuement écoutés, que nous n’avons pas chroniqués ? Uniquement par manque de temps. D’où une seconde salve de notre rubrique « chroniques accélérées ».

 « You’re more kid than criminal »

Sorti en février dernier, le deuxième album de l’Australienne Julia Jacklin est probablement notre grand frisson de ce début 2019. Écouté quatre fois en… quatre heures au moment de sa réception, Crushing (Liberation Records) dévoile un féminisme incendiaire, un humour vachard, une voix faussement songeuse mais terriblement affirmée. Pas si loin d’une Aldous Harding, ce folk-rock s’admet rêveur mais, en contrepoint, il canarde sec, dégoupille les grenades et ne se laisse guère intimider par le machisme ordinaire. Rien de social chez la jolie Julia : la tonalité se veut intimiste, souvent autobiographique, mais avec cette distance qui permet toutes les audaces lexicales, tous les coups destroy. Grand disque ? Yes, sir ! Remercions au passage les conseils avisés de certains amis mélomanes, sans qui nous serions passés à côté d’une telle offrande…

Bill Pritchard - Midland LullabiesHaute fidélité

Un nouvel album de Bill Pritchard est un événement personnel. Raison basique : Bill ne sort que des bons disques (depuis… toujours !). Raison subjective : il existe une correspondance entre la musique du compositeur et son cercle d’auditeurs. Midland Lullabies (Tapete) ne renouvelle en rien les précédents travaux de Bill, mais il leur apporte une épure, une simplicité qui brise le cœur du fan. Du Pritchard à l’os, finalement pas si loin d’un Songs from a Room (Leonard Cohen).

Midland Lullabies confirme également cet argument : de tous nos songwriters anglais fétiches issus du milieu 80’s (Morrissey, Guy Chadwick, Lloyd Cole), Pritchard est aujourd’hui le seul à ne pas décevoir – avec Lawrence et Peter Astor.

Normcore - Six PackLa France qui canarde

Beau début d’année pour le rock et la pop d’ici et nulle part ailleurs. Nous ne parlons évidemment pas de Cléa Vincent ou de l’aigreur Bruit Noir mais des EP génialement anticonformistes de Normcore (Six Pack – Autoproduction) et d’Accident (Dernier VoyageLittle John – Le Label). Qu’ils œuvrent dans un déluge sonique façon Pixies ou Weezer (les premiers) ou dans une pop Aline… accidentée (les seconds), ces formations, à ne surtout pas oublier au moment des référendums 2019, apportent une sincérité, un jeu avec les influences, l’idée de traquer une nouveauté dans diverses sonorités validées depuis longtemps. Du vintage, il y a donc encore des choses à extirper.

Accident - Dernier voyageEn même temps, rien de surprenant venant de ces pourfendeurs : nous aimons l’intégrité Normcore depuis 2015 et leur superbe Magic Johnny (avec le tube, virtuel, Morning Thoughts), et le duo Accident (Laurent Maudoux et Jérémy Monteiro) était aux abonnés absents depuis… 2011 !

À ces deux bulldozers s’ajoute le premier EP de Modern Men (en avril chez le collectif SOZA), dont nous avons déjà parlé, que nous adorons, et qui permet à Adrian (chanteur possédé de MNNQNS) de lancer un duo hardcore en plein bitume (avec l’une des meilleures compos de l’année : Rouen a de l’eau jusqu’aux épaules).

The Brian Jonestown Massacre 2019Anton, es-tu là ?

Groupe génial mais dont nous avons déjà tout dit, tout écrit, et qui se contente de sortir chaque année peu ou prou la même chose, The Brian Jonestown Massacre dégaine en 2019 un disque éponyme (A Records) qui ressemble aux trois précédents et certainement ( ?) aux cinq suivants. Anton Newcombe est grand, certes. Oui mais : la routine musicale finit par lasser…

Sauf qu’avec l’auteur de Thank God For Mental Illness, les pronostics ne tiennent plus la route : en 2020, ou d’ici trois mois, Anton serait capable de balancer, à l’improviste, un chef-d’œuvre inattendu. Newcombe prévisible ? Méfiance…

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