Bilan 2020 : Et la musique sauva le monde…

Slim Whitman - All My BestOn a tous en tête le final de Mars Attacks, film fameux de Tim Burton (1996), durant lequel la diffusion sur ondes courtes de la formidable chanson, Indian Love Call, de Slim Whitman met en déroute (et accessoirement fait exploser la tête) des indélicats envahisseurs. A l’échelle de notre année 2020 pourrie, la musique aura surtout eu cette fonction ces derniers mois : nous sauver la vie ou du moins, nous autoriser à penser qu’elle existait encore. On a certes pas encore trouvé la chanson qui fera reculer la Covid 19 et rétablira la paix dans le monde mais c’est tout comme….

Enfermés, prisonniers, masqués, parfois malades, amaigris ou affligés, encagés avec nos familles insupportables, nos gamins braillards, nos amis lointains, nos collègues sur les genoux portables d’un écran d’ordinateur, on n’est pas passés loin de l’enfer (ou du bonheur absolu). Malgré la fermeture des librairies, des théâtres et l’absence de guitares qui résonnent, la musique de 2020 aura été omniprésente et la seule qui nous aura permis (avec quelques livres, séries TV pour d’autres) de surnager et de nous évader. Le classement des meilleurs albums de 2020 pourrait tout aussi bien aller aux morceaux de 1978, de 1983, de 1996 qui ont rejailli par la grâce du temps déposé à nos pieds par les pouvoirs publics, des tréfonds de notre discothèque pour resplendir à nouveau. On a écouté des vieilleries, butiné de vieux vinyles, de vieux fichiers, de vieux CDs brisés et oubliés de longue date. Plus que les productions de l’année, c’est ainsi LA MUSIQUE dans son ensemble qu’il faudrait honorer pour avoir contribué à nous sortir de ce mauvais pas.

Mais cela ne rendrait pas justice aux disques assez merveilleux qui ont fait notre ordinaire claquemuré. 2020 aura été une année d’explosion mélancolique et de retour sur soi, une année pour les musiques tristes, intimes et privilégiant les voyages intérieurs. Là où les années précédentes foisonnaient et invitaient à danser, 2020 aura honoré les musiques de chambre, de lit, les musiques souffreteuses et musiques souffrantes, revenant aux racines d’une pop jeune et réflexive, sentimentale parfois, mais toujours attentive à saisir l’émotion d’un cœur brisé ou d’un espoir déçu. Ce sont ces musiques-là qui nous ont accompagné pendant douze mois, qu’elles viennent d’Amérique (les garçons à fleur de peau de Choir Boy, les Canadiens de Close Talker ou Aidan Knight) ou d’Angleterre (Sophia de retour, Jim Bob) ou d’Irlande (Fontaines DC en état de grâce), de Grèce avec le fabuleux Vagina Lips, de Pologne (Better Person), de Nouvelle-Zélande et d’Australie (Cut Copy, Scalper, les plébiscités Rolling Blackouts Coastal Fever) ou de France (Lætitia Sheriff signant peut-être le grand album de rock français de l’année), qu’elles résonnent rock, pop ou hip-hop, les musiques de 2020 ont évoqué à la perfection le côté sombre de l’époque en l’éclairant à la bougie de l’âme humaine. Ces musiques ont toutes ou presque sonné comme des musiques résistantes et résilientes, opposant au déchaînement de déveine la droiture morale et esthétique d’un artiste souvent solitaire et dressé contre l’air du temps. Jamais comme en 2020, les musiques n’ont été aussi délicieusement politiques par leur poésie, jamais aussi intelligemment à contre-courant de la sinistrose, jamais autant hors du temps et actuelles.

2020 est l’année des musiques actuelles, l’année des musiques qui n’ont plus droit de se produire en live mais qui, en prenant le contre-pied de cette mesure coercitive, ont respiré l’air intérieur plus intensément et plus précieusement que jamais. Dans une année faite pour eux, certains comme Doves, epic45, Pere Ubu, Wire ou encore Sophia ont fait mieux que d’autres. 2020 a récompensé les tordus et les mélancoliques. Morrissey et The Apartments n’ont pas brillé et Biolay n’a pas convaincu. Nine Inch Nails est venu pour rien. On est resté imperméables au retour de The Strokes, sceptiques avec Andy Shauf ou King Krule. On a aimé la fraîcheur de Soccer Mommy, la vivacité de Melanas, le talent de Senbeï, l’audace de Viot et de RVG, la constance de Murat, le retour de Dominique A, la magie insoupçonnée de The Innocence Mission et Drab City. Il est à parier que chacun retiendra les siens au moment du bilan final car l’histoire de ces disques aura été, encore plus que les années précédentes, une question de compagnonnage intime, de conditions d’écoute et de réécoute.

Côté sonorités, on a eu le sentiment que la vague synth-pop et enjouée des années précédentes se calmait, laissant la place à un renouveau de sonorités post-punk, plus froides et mécaniques, mais aussi plus expérimentales à l’image d’un BBCC givré, d’un Wrangler détraqué ou d’un LANE électrisé. Les musiques instrumentales ont continué à progresser et à se passer de voix. Mogwai, Kosemura, Watine ont poussé des disques muets qui ont compté. Mais les grands disques parlants n’auront pas été en reste: le hip-hop français a connu une année étincelante avec Thousand en tête mais aussi le Klub des Loosers à la hauteur de sa réputation, l’OVNI Drache, l’uppercut Swift Guad/ Al’Tarba et les plus poétiques Gelatine Turner. Ou encore la grâce de Les Marquises dans un autre registre. C’est aussi là que ça se passe. En France et dans un grand écart de plus en plus manifeste entre parlé/chanté, pop/rap/spoken word et rock. 2020 aura été une année bruyante et électrique, downtempo et brumeuse.

Que retenir de tout cela au final ? L’idée qu’on n’y a pas compris grand chose, qu’on a été plus souvent émus, secoués, perdus que sachant où on habite mais qu’étrangement et sur le plan musical, on a pris notre pied à assister à un tel festival. Si ceux en plein air ont été annulés et reportés, ceux qui se sont joués dans notre tête ou dans notre salon, ont été salutaires et on ne parle pas des facebooks live du pauvre et des concerts fenêtres ouvertes qui, à de rares exceptions près (l’ambitieux SOHN, Sophia, le Wedding, les rendez-vous du soir de Pat Fish), nous auront barbé. 2020 est une année malade et domestique qui, on l’espère, enfantera une année portes ouvertes, aérée et houblonnée de sons. Il reste quelques heures avant ça et on espère en être…

Benjamin BERTON

Top Albums

01. Vagina LipsOutsider Forever
02. Scalper – The Beast and The Beauty
03. Sophia – Holding On/ Letting Go
04. BabybirdFake Blood
05. ViotHallali
06. Le Klub des LoosersVanité
07. dAMEbLANCHEVirage
08. Les MarquisesLa Battue
09.  Private World – Aleph
10. Drab CityGood Songs for Bad People

Top Chansons

01. Aidan KnightMary Turns The Pillow
Un oreiller, les yeux fermés et au lit. Qui pour remonter dans le temps et aimer à nouveau ? « I miss you on your birthday/ i miss you every single day / i miss you and i hate myself/ for living without you« 

02. ScalperInk
La plus belle chanson de mort depuis Holocaust de Big Star.

03. StickHexagone 2020
Connard de virus. Coronavirus. Chaque année à partir de 2020, Stick reprend un titre de Renaud. Cette année, c’était Hexagone et le gars avait tout vu venir mieux que Castex.

04. ViotPick Up
On aimerait vivre un jour dans une chanson de Viot. Ce serait l’Amérique.

05. Vagina LipsI Dont Want This Day To End
Le Just Like Heaven grec est la meilleure chanson de l’année. On l’a planquée là pour que personne ne la remarque.

06. Rocket MikeThis Is My Brain
Rocket Mike est notre héros. Le tube positif de 2020 : le seul.

07. WranglerAnthropocene
Kraftwerk est mort. Mark E. Smith aussi. Le dernier album de Front 242 est sorti en 2003. Il reste Wrangler. Il ne fallait pas massacrer la planète.

08. William Loveday IntentionI Wasn’t Made For This World
Nous non plus on aime pas l’époque et le monde dans lequel on vit. On se tient du côté de Billy Childish et on en prend plein la gueule à longueur de journée. Le pire, c’est que comme lui, on est même pas revanchard. On ne fait que chanter et encaisser. On ne fait que tendre l’autre joue.

09. Drab CityStanding Where You Left Me
2020 était une année trip-hop, pluvieuse et triste comme la mort. Il paraît que Lars Von Trier va tourner une suite à l’Hôpital et ses fantômes. Drab City pourrait faire la bande-son. Ce serait mortel. (non, ils ne sont pas français mais ils font seulement semblant)

10. Mike LawAt Least
Faire un groupe de deux quand on est tout seul. Au moins, Mike Law aura essayé. Au moins, il l’aura fait. Au moins il aura aimé. Et il a presque réussi.

Jean THOORIS

Par intitulé et sans classement.  

1) Trois musiciennes walkyries :
Mira CétiiCailloux & Météores (ArtDisto / L’autre Distribution)
EskimoQue faire de son cœur ? (Autoproduction)
Laetitia ShériffStillness (Yotanka)

2) Deux disques électro french aux vertiges de l’amour :
BrazzierLignes Futures (Binaire Ordinaire)
ChasseurCrimson King (Reptile)

3) Des jeunes gens toujours modernes :
Jean-Louis MuratBaby Love (Pias)
Pet Shop BoysHotspot (X2)

4) Roi et reine :
PJ HarveyDry Demos (Island Records)
SophiaHolding On/ Letting Go (The Flower Shop Recording)

5) Des incorruptibles :
Centredumonde & Claire RedorThe Sweet Kiss EP (Autoproduction)
Churros BatimentDix-neuf mars (Autoproduction)

6) Les Smiths nous font toujours craquer :
Choir BoyGathering Swans (Dais Records)

7) Une chanson populaire :
Katy PerryHarleys In Hawaii (Capitol Records)

8) Une réédition vinyle attendue :
Matthieu MalonFroids (Le Village Vert / lost in music records)

9) Un album pour 2021 :
Léopoldine HHLà, Lumière Particulière (Eh Ouais Mec Prod / Modulor)

David B.

Top Albums

01. Benjamin BiolayGrand Prix
02. MuzzMuzz
03. Sophia Holding On/ Letting Go
04. ThousandAu Paradis
05. The Apartments In and out of the Light
06. Laetitia SheriffStillness
07. DovesThe Universal Want
08. Fontaines D.C.A Hero’s Death
09. I Like Trainskompromat
10. Phoebe BridgersPunisher
11. HervéSuper
12. Matt ElliottFarewell To All We Know
13. Epic45Cropping the Aftermath
14. Taylor Swift Folklore
15. Porridge RadioEvery Bad

Top Chansons

Ça y est ? On en termine avec 2020, année du commencement du début de la fin ?
Si le Manteau de Pluie de Murat fut l’un des dix albums que j’ai écouté le plus au cours de cet an coronavicié, ce sont les chansons seules, loin des longs formats les retennant, qui ont fait office de petits manèges obsédants. Je les commente ci-dessous sans les ordonner vraiment.

Pauline DrandAstre Clair
Ce webzine est presque né en même temps que l’avènement de cette chanteuse hypersensible. Depuis ou presque celui-ci ne livre pas son annuité rédactionnelle sans consacrer une ligne à Pauline.
Astre Clair figure sur une compilation de La Souterraine. C’est une promesse poétique émise devant un piano qui s’envola au milieu du premier confinement. Une chansons qui annonce peut-être la couleur du successeur au merveilleux Faits bleus.

Benjamin Biolay & AdéParc Fermé / Benjamin BiolayComment est ta peine ?
Biolay a deux reprises. Grand Prix, son dernier album est parfait de bout en bout. Son récent duo avec Adélaïde Chabannes de Balsac forme les trois minutes et quelques idéales pour filer une claque au blue mood. Comment est ta peine ? est un tube imparable qui dépose la chanson français sur le perron de L’Haçienda.

PommeComme tu dis
Claire Pommet fait partie de cette génération de jeune femmes inspirantes venues revivifier la scène française. Le très touchant Comme tu dis clôt la réédition de son album Les failles sortie fin octobre.

LonnyIncandescente & Avril Exil
Lonny à deux reprises aussi. Louise devrait sortir son premier album en 2021. Subjugués par la qualité des deux chansons qui le précèdent, on se languit déjà.
Avril Exil est un des sommets de cette année hideuse.

HervéAddenda
Son album, Hyper, est vraiment super. C’est le disque idéal pour prendre la tangente. L’énergie d’Hervé est communicative, elle déborde de partout sur le lumineux Addenda.

ChrisPeople I’ve been sad
Le Time ne s’est pas trompé en portant au pinacle People I’ve been sad, titre extrait du EP La vita nuova de Christine & The Queens. La singularité de la chanteuse est mal perçue chez elle. Les anglo-saxons l’adorent. Il faut dire qu’elle est une des rares artistes francophones à pouvoir rivaliser avec les stars américaines. Elle chante, elle danse et est suffisamment fantasque pour ne pas se impressionner par les late shows.

FinlayStrange
On ne sait rien de cet anglais auteur de ce beau Strange sorti il y a quelques mois

BeauDance With Me
Benjamin a tout écrit sur cette chanson produite par un beau duo de filles constitué d’Heather Goldin et Emma Jenney.

Billie EilishNo Time To Die
La petite prodige américaine, 19 ans à peine, a inscrit son nom au panthéon des artistes qui auront produit un thème pour la franchise James Bond. Le sien, coécrit avec son frangin, est l’un des plus marquants de ces derniers années.
Billie Eilish a pu l’interpréter avec un orchestre symphonique, et en compagnie de Johnny Marr et d’Hans Zimmer lors de l’édition 2020 des Brit Awards. Frissons garantis.

Marie-FloreC’est si bon
Son Braquage fait toujours des étincelles. Marie-Flore y racontait, avec un talent de dingue, sa rupture. Depuis la chanteuse a refait le grand saut et aime à nouveau. Elle le chante très bien avec ce C’est si bon qui parachevait ses derniers concerts.

Trespassers WilliamsWinterstorms
Une chanson des Trespassers Williams est toujours un miracle.

DovesPrisoners
Le retour des Doves était inespéré. Ce single on l’aurait volontiers déniché dans les bacs de Planet Claire, le disquaire orléanais chez lequel on a dépensé tant d’argent à la fin des années 90 et au début des années 2000.

Porridge RadioLong
Every Bad
est un des tous meilleurs albums parus cette année. Le groupe anglais ne fait pas dans la bluette, cet intense et dépressif Long le prouve.

ThousandLe rêve du cheval
La grande chanson d’un album exigeant qui pourtant foudroie dès la première écoute.

Olivier Meridians

Top Albums

01. ThousandAu Paradis
02. Epic45Cropping The Aftermath
03. Jérôme MinièreCancionero De Palacios
04. SophiaHolding On/ Letting Go
05. MelenasDias Raros
06. LesneuBonheur Ou Tristesse
07. Michel Cloup Pascal Bouaziz Julien RufiéA La Ligne
08. Rolling Blackouts Coastal FeverSideways To New Italy
09. Les MarquisesLa Battue
10. TapewormsFuntastic

Top Chansons

01. OssayolHaunted Head
C’est un mail comme on en reçoit plusieurs par jour quand on est chroniqueur chez Sun Burns Out ; il est tellement facile de passer à côté. C’est qu’en général, quand on prend enfin le temps de tout éplucher, l’affaire est vite entendue, en à peine quelques secondes de Bandcamp, Soundcloud ou YouTube. Et puis parfois, le temps s’arrête séance tenante : mince, c’est quoi ça ? Un nom parfaitement inconnu, une chanson sortie de nulle part, une vidéo magique et très vite, le sentiment que ce morceau va être là longtemps, très longtemps.

02. Keeley ForsythStart Again
Extrait de Debris, le premier album de l’artiste britannique Keeley Forsyth sorti en tout début d’année, Start Again est une merveille de chanson électronique sombre et glaciale, perdue au fond des bois à la recherche d’une issue introuvable. D’ailleurs, elle emprunte allégrement sa ligne mélodique à une ainée prestigieuse, A Forest de The Cure qu’elle parvient quasiment à égaler. Excusez du peu.

03. Bantam LyonsBranque
Branque est exactement le genre de baffe, mieux, d’uppercut qui vient vous rappeler pourquoi, depuis que vous êtes en âge d’écouter du rock, vous accumulez soigneusement tous ces beaux objets, vous construisant pas à pas votre propre culture musicale, à la recherche de ce moment précis. Si ce n’est que la première étape du retour de Bantam Lyons, il est d’ores et déjà gagnant.

04. Flyying ColoursBig Mess
Alors que des jeunots lillois tentent avec succès de régénérer le genre, aux antipodes, d’autres ne prennent pas cette peine et se contentent de suivre la recette vieille comme les cheveux de Mark Gardener. Big Mess n’est rien d’autre qu’un bon vieux brûlot noisy pop puissant, guitares distordues en avant, larsens de rigueur et voix mixtes cajoleuses portant une mélodie parfaite. Ne vous reste plus qu’à ramasser les chaises que vous venez de faire tomber en sautant partout.

05. Even As We SpeakUnknown
Il y a les petits jeunes, et il y a les quinquas, celles et ceux qui au final, nous ressemblent. Cette année, Adelphi et sans doute plus particulièrement ce titre, Unknown, auront brillamment marqué le début du reste de la vie d’Even As We Speak, australiens jadis membres de l’écurie Sarah records dans les années 1990. Lucides, ils jettent sur leurs vies et un peu sur les nôtres aussi un regard tendre et émouvant, dénué de la moindre ambition mais porté par l’idée qu’il reste encore quelques rêves à atteindre. Si l’un d’eux était de réaliser un second album marquant, 28 ans après le premier, c’est déjà réussi.

06. Youth ValleyYoung Sad Lovers
Rien de nouveau. Tenez, la dernière fois, c’était en 2014 avec un groupe californien, Crescendo. Deux albums parfaits, le temps de la fac sans doute, une pop lumineuse et vitaminée, ultra sensuelle et puis plus rien, on passe à autre chose. Peu importe alors quel sera le destin de ces grecs juvéniles : si comme sur ce premier ep, ils parviennent à nous faire croire qu’on a encore 22, 23 ans et qu’on a la vie devant nous, on prend. Renouveler l’exploit de tenir une telle qualité sur un album sera une sacrée gageure et s’ils y parviennent, ça sera à coup sûr un sacré disque.

07. MermonteIn Circles
Un mot pour 2020 ? Au hasard… « confinement » ? C’est qu’on en aura vu des choses sur les internets pendant ces longues semaines inédites et pour tout dire, globalement largement dispensables. Mais on pouvait compter sur le savoir-faire et l’intelligence des rennais de Mermonte pour ne pas s’aventurer dans l’expérience sans garanties. Celle par exemple de tenir un sacré morceau que cette bande de musiciens talentueux allait réussir à faire vivre en distanciel comme on dit maintenant. Ça claque, sec, net et précis, dans un registre plus rock qu’à l’accoutumée mais illuminée par des claviers aériens et des voix féminines angéliques. Efficace.

08. A Girl Called EddyFinest Actor
Découvert sur le tard, ce second album d’A Girl Called Eddy aurait pu sur la foi de ce single automnal, prétendre à mieux mais non. Finest Actor, titre empli de tristesse et de mélancolie toute britannique (pas mal pour une américaine) est bien le temps fort de ce disque qui ne parvient pas à le faire oublier.

09. Dominique AL’éclaircie
Lui aussi s’est ennuyé au printemps dernier. Alors, pour mieux chasser le fantôme de Philippe Pascal qui le hantait, il en a profité pour écrire un très bel essai et reprendre une de ses chansons emblématiques, parce que lui aussi est finalement plus Marc Seberg que Marquis de Sade. Cette reprise de L’Eclaircie n’égalera pas l’originale pas plus qu’elle n’est la reprise la plus aboutie à laquelle se soit attaqué Dominique A, mais elle le goût succulent de la madeleine et l’amertume du temps qui passe et emporte les idoles de l’adolescence.

10. The Empathy ExamsIf It’s A Symbol, To Hell With It
Il y a quelque chose d’un peu étrange à vivre le revival de quelque chose qu’on a pleinement connu il y a plus de 20 ans. C’est un peu le cas de la noisy pop, mais l’électronica du tournant des deux siècles semble reprendre des couleurs et l’un de ses plus fervents défenseurs, le belge Arne Van Petegem, n’a pas manqué d’actualité cette année. Le duo qu’il forme avec Dieter Sermeus, The Empathy Exams, remet au goût du jour ces longues plages électro-mélancoliques, ou quand les machines vous foutent le frisson et vous tirent des larmichettes.

Denis

Le top le plus attendu pour les cœurs d’artichaut

01. Choir BoyGathering Swans [Dais Records] Trop maniéré ? Trop référencé ? Trop à fleur de peau ? Non, juste la musique qui nous bouleverse et nous transcende. Et puis, peut-on encore faire semblant en 2020 ?

02. Rolling Blackouts Coastal FeverSideways To New Italy [Sub Pop] La magie due à l’isolement aux antipodes ou tout simplement le génie de la simplicité ? En tout cas, les Australiens sont les meilleurs pourvoyeurs de tubes à guitares croisés cette année.

03. Private WorldAleph [Dais Records] Bien éduqués, biens élevés, mais certainement pas formatés. Quand les suiveurs parviennent, au mieux, à singer, eux, ils incarnent. Groupe le plus classe de l’année – à l’aise.

04. DovesThe Universal Want [Heavenly] Un vieil adage de la pop culture veut que les héros ne meurent jamais. Parfois même, ils reviennent encore plus forts.

05. epic45Cropping The Aftermath [Wayside And Woodland Recordings] On a beau être des groupies invétérées, avouons-le quand même : epic45 signe enfin l’album qu’on attendait d’eux, celui qui fait fructifier l’héritage de Hood et Boards Of Canada. Rien de moins.

06. Fontaines D.C.A Hero’s Death [Partisan Records] Clivants, indéniablement. D’ailleurs leur précédent album avait fédéré les foules mais on n’en avait cure. En revanche, quand l’émotion supplée l’énergie, on plussoie.

07. Kevin KrauterFull Hand [Bayonet Records] « Pas mal » à la 1ere écoute. « Trop bien » à la énième. Voilà qui fait toute la différence entre une femme fatale qui fera tourner les têtes et asséchera les cœurs et la femme de ta vie.

08. Closer TalkerHow Do We Stay Here? [Sinnbus] Il aura fallu un an à cet album pour parcourir la distance entre l’Ouest Canadien et Berlin. Dans ce laps de temps, le groupe a ajouté 4 titres comme clause de revoyure. Découverte majeure d’un groupe mineur.

09. Kevin MorbySundowner [Dead Oceans] Un jour, cela finira mal. Trop de noirceur, trop d’excès chez Kevin Morby. Pourvu qu’on puisse le serrer dans nos bras avant cela pour lui signifier l’importance de ce qu’il nous donne à travers ses albums.

10. Vagina LipsOutsider Forever [Inner Ear] Ça fait deux ans (et 3 albums) qu’on s’est entiché de Jimmy Polioudis. Et autant de temps qu’il monopolise le leadership en matière de revival new-shoegaze-post-wave. Notre héros, notre copain.

11. Marlin’s DreamingQuotidian [Auto-production] C’est à en pleurer, mais c’est révélateur de notre temps : l’une des plus belles découvertes de jangly-pop n’a même pas les honneurs d’une sortie sur un support physique. Il faudrait que Captured Tracks tourne une oreille vers la Nouvelle-Zélande.

12. TurnoverAltogether [Run For Cover Records] Certains chassent le hit. Eux construisent un album riche en gimmicks imparables. Un cauchemar pour programmateur radio. Pour ceux qui aiment chalouper sur Whitest Boy Alive, Motorama ou Galaxie 500.

13. SOHNLive With The Metropole Orkest [4AD] Ironie de la situation : alors qu’on attend avec fébrilité ses nouvelles compositions électroniques, l’Anglais livre une fantastique version live et symphonique de ses deux précédents albums… dans une année privée de concert.

14. Sophia – Holding On/ Letting Go [Flower Shop] Indéniablement, l’album qu’on aura le plus attendu cette année. Et qui est (bien) comme on l’attendait. C’est d’ailleurs là le seul défaut qu’on pourra lui trouver.

15. Cut CopyFreeze, Melt [Cutters Records] Autrefois tête d’affiches des festivals pour ambiancer jusqu’au bout de la nuit, le groupe australien fait passer sous les radars son album le plus personnel à ce jour. Vive le kraut-pop-électro déprimé.

16. The Innocence MissionSee You Tomorrow [Thérèse Records] On se souvient de la 1ere fois. On se souvient aussi de la dernière. Ces chansons qui convoquent le fantôme de The Sundays fixent chacun de ces moments sur des instantanées sépia.

17. Douglas DareMilkteeth [Erased Tapes] Accepter qui on est n’est jamais simple et peut prendre du temps. Dans cette quête du soi, Douglas Dare fait un grand pas pour trouver sa voi(x).

18. MJ GuiderSour Cherry Bell [Kranky] Le parti pris est exigeant et il faut se plonger corps et âme dans ce deuxième album pour apprécier la beauté de ces mélodies délitées sur lesquelles flotte le spectre de Cocteau Twins soit ecstasy.

19. Cold BeatBrother [DFA] Il ne faut pas grand-chose pour composer de bonnes chansons : une boîte à rythme, des nappes de synthés brumeuses, des mélodies aigrelettes sur une guitare basse métronomique. Mais il faut avant tout un supplément d’âme.

20. C’MONConfusing Mix of Nations [Mexican Summer] Ne comptez pas sur eux pour le plan promo, par compte pour tendre des chausse-trappes mélodiques, le duo excelle.  Ces deux-là sont capables de condenser un album entier de Yo La Tengo ou de Pet Shop Boys en 1 seul morceau – avec le sourire aux lèvres.

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1 Comments

  1. says: Alaph Asant

    En ce qui me concerne, mon top:

    LP:
    BC Camplight « Shortly after take-off »: Brian Christinzio ne porte pas le même prénom que Brian Wilson pour rien
    Andrea Laszlo de Simone « Immensita »: le fils caché de Lucio Battisti et pas très loin d’une version italienne de Sufjan Stevens
    Dua Lipa « Future Nostalgia » Aussi bon que les albums de Madonna à sa grande époque
    Buvette « 4ever » contient la meilleure chanson de l’année « Last dance »
    Thousand « Au paradis » De loin le meilleur album français. Néanmoins une dérive Capdeviellienne pour la voix qui m’inquiète pour le prochain album
    Damien Jurado « What’s new tomboy » A un niveau juste en-dessous de son chef-d’oeuvre « The horizon just laughed »
    Morrissey « I am not a dog on a chain » pas loin d’être le meilleur album de Morrissey depuis qu’il a quitté les Smiths.

    EP:
    Faux Real « Faux real ». Probablement le disque que j’ai le plus écouté cette année. Dans un monde normal, ils devraient devenir énormes.

    Rééditions:
    The Beloved « Happiness » Special Edition. Réédition augmentée d’un de mes albums préférés

    et meilleure 1ere moitié d’album: Vagina Lips « Outsider Forever ». Parce que les 4 premières chansons sont incroyables

    Merci à SBO pour ce que vous faites

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